Le temps au travail

Le chiffre un peu arbitraire et vide de substance, mais qui peut faire ronchonner

A l’échelle d’une vie, combien de temps passe-t-on au travail (et par travail, j’entends une définition “naïve” : l’activité professionnelle) ?

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On a fait le calcul il y a quelques années, à la fac de psycho, à l’occasion d’un cours avec les étudiants du Master de psychologie du travail. Je venais de voir une pub putaclic pour du bilan de compétences qui annonçait qu’on passait quelque chose comme la moitié de sa vie au travail, et on voyait bien que c’était pas vraisemblable (ça ferait 84 heures par semaine tout de même. Certains le font, mais c’est pas la norme).

Mais on avait pas la vraie réponse.

Je vous restitue ici les données et le résultat. Vous pouvez faire un petit jeu avec vous-même : à votre avis, combien ?

Le cahier des charges

Nous avions décidé de partir sur un travailleur moyen – au sens statistique du terme -, et parfait – au sens d’un patron qui l’exploiterait 😉 : jamais malade, jamais au chômage, qui travaille plus que demandé – soit :

  • Un homme, qui vit pile l’espérance de vie moyenne pour un homme en France : 79,7 ans (chiffres fournis par l’INSEE, 2019)

  • Qui travaille 47 semaines par an et bénéficie de 5 semaines de congés payés.

  • Qui ne change jamais d’entreprise, n’est jamais malade, n’est jamais au chômage. Bref, qui ne manque jamais un jour de travail et travaille tous les jours (y compris les jours fériés).

  • Il travaille 8 heures par jour, 5 jours par semaine (40h semaine, donc constamment en heures sup’). Grands seigneurs, nous lui avons aussi octroyé une pause déjeuner d’une heure et demie (mais comptée comme du temps passé au travail) et 50 minutes de temps de transport par jour (chiffres fournis par la DARES (2015)), comptées aussi comme temps de travail.

Soucieux de ses droits à la retraite, nous avons aussi décidé qu’il travaillerait ainsi pendant 43 ans et cotiserait 172 trimestres.

Un bon gars quoi, pas feignant.

Les résultats

Je décompose un peu :

  • Sur une journée travaillée, il alloue donc 620 minutes au travail, ce qui ne lui laisse que 820 minutes hors-travail. Ça fait un ratio de 620/1440, soit 43,06 %.

  • Sur une semaine travaillée, il alloue 3100 minutes au travail, ce qui ne lui laisse que 6980 minutes hors-travail. Ça fait un ratio de 3100 / 10 080, soit 30,75 %.

  • Sur une année travaillée (47 semaines), il alloue donc 145 700 minutes au travail, ce qui ne lui laisse que 378 460 minutes hors-travail. Ça fait un ratio de 145 700 / 524 160, soit 37,80 %.

  • Sur une vie, il allouera donc 6 265 100 minutes au travail, ce qui rapporté à son espérance de vie exprimée en minutes (41 890 320 minutes), fait un ratio de : 14,96 %.

Après, on fait quoi de ce chiffre ?

Je ne sais pas. Ce que vous voulez.

Je sais que pour nous, c’était une surprise. Certains étudiants résistaient, et ont refait les calculs pour être sûr de ne pas avoir fait d’erreur. Et on a discuté et débattu avec ardeur.

J’ai trouvé ça amusant. Des fois je m’en sers en entretien pour essayer de décaler le rapport au travail. Un patient m’a dit récemment qu’il avait affiché ce chiffre sur son bureau : ça l’aidait à prendre du recul – de la restructuration cognitive facile.

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